Moscou 21h :
Alissa nous accompagne à la librairie pour acheter un guide sur la Chine. Il faut déjà qu’on pense à la suite du voyage. Le visa chinois semble plus compliqué à obtenir à cause des JO, mais ça ne va pas nous arrêter !
Moscou 21h30 :
Une petite patate chaude pour se remplir le ventre. Le transsibérien n°010 en partance de Moscou ce soir et arrivant 47h plus tard à Novosibirsk nous attend : il faut prendre des forces !
Moscou 22h30 :
Départ de chez Adeline, direction la gare.
Moscou 23h10 :
Le train tant convoité est devant nous.
Notre nouvelle maison pour les deux prochaines nuits et les deux prochains jours est devant nous.
Jeunes, parents, enfants, et militaires bien attaqués à la vodka/bière sont massés devant le wagon n° 11.
« Biliet, Passport ! » nous lance la Provodnitsa pour le sésame jusqu’aux couchettes 18 et 20, perchées au beau milieu de notre « platskart », au beau milieu de nos 60 nouveaux colocataires… Ca promet !
De retour en octobre 2007, c’est la première idée qui nous et venue à l’esprit à la genèse de ce long périple :
« Je rêve de prendre le Transsibérien jusqu’au lac Baïkal, aux portes de l’Asie ! »
Aujourd’hui, 6 mois plus tard, nous y voilà et c’est une sensation bien étrange. Une sensation qui nous dit que tout est possible quand on brise nos propres barrières. Cela nous rappelle aussi la chance incroyable que nous avons d’avoir ce rêve à portée de main, d’avoir les moyens de le réaliser.
Transsibérien, 1ère nuit :
Nos deux voisines du dessous, Nadia et Irina, nous parlent déjà et nous aident à nous installer. La magie du langage universel opère (Véro ne parle que quelques mots de russe, moi aucun !) :
« Vous voulez ranger vos sacs en dessous de mon siège ? » => Niet !
« Vous avez vos sandales pour vous balader dans le train ? » => Niet !
« Vous avez des tasses pour le thé ? » => Niet !
« Bon… vous pouvez vous assoir sur nos lits avant de vous coucher là-haut ! »
On est vraiment des bleus, et on s’est bien fait repérer !
Après une petite bière en guise de somnifère illusoire, nous nous endormons comme des loirs. Le rythme et la balance du train sont envoutants…
Transsibérien, 1er matin :
1ère mission : Petit déjeuner sur la table de nos voisines du dessous.
L’approvisionnement en eau chaude pour le thé se fait en début de wagon. La bouilloire a des allures de réacteur atomique.
2ème mission : Brossage de dents « salvateur » dans les superbes toilettes du wagon.
La journée peut commencer.
Transsibérien : 1ère journée :
Rencontre avec nos voisins de palier pleins de vie : un couple et leurs deux enfants (Denis et Veronika). On est définitivement bien entourés.
Le paysage défile… Les villages ne paient pas de mine, les forêts marécageuses nous coupent la vue…
Tout est gris, surtout les premières villes que nous traversons. Des barres d’immeubles à perte de vue, des usines, quelques statues de Lénine.
Certains arrêts en gare sont plus longs. Le temps pour nous de s’approvisionner en nourriture… et en bière bien évidemment (l’apéro n’a pas d’heure dans ce train).
Les vendeuses et vendeurs à la sauvette grouillent sur le quai. Ils sont au rendez-vous à chaque gare : poissons séchés, salades de béteraves, nouilles liophilisées et bières sont de rigueur.
La journée passe à une allure ahurissante, mais nous avons le temps de discuter le bout de gras avec nos voisins.
Vladimir, le père de famille, est dans le business de voitures. Il part avec sa femme, son fils Denis et sa fillette Veronika pour un mois vers le lac Baïkal pour rendre visite à leur grand-mère. Retour aux sources pour les vacances : les parents ont grandis là-bas.
Denis est ceinture verte d’Aikido et Veronika sait déjà lire le cyrillique alors qu’elle n’est pas encore à l’école !
Nadia et Irina travaillent pour des musées et étaient de visite à Moscou pour deux jours (et six jours de train) pour assister à un meeting. Elles habitent Krasnoïarsk et font beaucoup d’efforts pour communiquer avec nous.
Pas besoin de connaître parfaitement la langue pour communiquer : quelques mots de russe, des gestes, des mimes, un papier et un crayon nous ont suffi pour comprendre leur histoire et expliquer la nôtre.
Petite sieste de 2-3 heures (il ne faut pas se laisser abattre), puis nous finissons la journée par un dîner au wagon-restaurant tout de bois vêtu… enfin de lino imitation bois, s’il vous plaît.
Truite saumonée pour Madame et Poulet rôti pour Monsieur.
C’était une expérience à faire, mais à ne surtout pas recommencer, puisque nous lui avons décerné la palme d’or dans la catégorie « Repas le plus dégueulasse depuis le début du voyage » 🙂
Transsibérien, 2ème nuit :
Ils éteignent les lumières de plus en plus tôt. Toutes les horloges sont à l’heure de Moscou, mais le décalage horaire nous court après.
Pour me consoler et puisque ça fait longtemps que je ne l’ai pas fait, j’ai la bonne idée d’écouter de la musique. Grave erreur !
Sans m’en rendre compte, tout le monde s’est endormi avant moi, dont quatre ronfleurs de compétition. Pour couronner le tout, le train s’arrête au beau milieu de nul part, ce qui laisse à nos quatre ténors tout l’espace sonore dont ils ont besoin pour s’exprimer !
2h plus tard, le train me délivre et recommence à me bercer… Alléluiah !
Transsibérien, 2ème journée :
Aujourd’hui le soleil a décidé de faire fuir les nuages pour le plaisir de nos yeux et pour nous montrer dignement ce nouveau paysage sibérien.
Les forêts sont plus éparses, ce qui nous donne vue sur de grandes plaines vertes. Les nuages ne sont pas pour autant partis, mais ils sont imposants, soulignant l’immensité de cette scène.
C’est confirmé, nous sommes dans le plus vaste pays du monde. Cela donne le vertige et en même temps, nous savons que ce n’est que le commencement.
La journée passe vite. De grandes discussions se lancent avec nos voisins : leurs origines, la Russie, la France, Paris, notre voyage, l’argent…
Ils n’ont aucun tabou à ce sujet. Ils sont ahuris par notre projet et il leur est difficile de concevoir que nous n’ayons plus de travail pendant un an, d’autant plus que nous voyageons à travers le monde. Les questions arrivent très ouvertement : combien gagnions nous d’argent en France, avec combien partons nous ?
Nous n’aimons pas les tabous à ce sujet, mais nous nous sentons un peu mal à l’aise. Résultat des courses : nous gagnions 7 fois plus que le plus haut de leurs salaires. Nous savons que l’écart sera encore plus grand en Asie et ça nous rappelle une fois de plus la chance que nous avons dans ce monde. Et pourtant, cela nous conforte encore plus dans l’idée de ce voyage. Nous sommes convaincus que nous avons raison de le faire, car nous découvrons ces pays, car les rencontres avec ces gens nous enrichissent et leur font tout autant plaisir.
Novosibirsk, 01h30 :
C’est l’heure des au-revoirs, une fois de plus.
Sur le quai, Anna et Dana nous accueillent les bras ouverts.
25° en pleine nuit, bienvenue en Sibérie.